27 Jean-Denis-Gabriel Polastron de la Hilliere

Jean Denis Gabriel de Polastron la Hillière fut baptisé[1] le 21 janvier 1625 à Loches, en Touraine, fils de Jean-Gabriel de Polastron de la Hillière, chevalier, seigneur de Grillemont, gouverneur pour sa Majesté des château et villes de Loches et Beaulieu et de Louise de Gast.

Il fut reçu chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem à l’issue de la tenue de la réunion du chapitre du prieuré d’Aquitaine ouvert à Poitiers, à l’hôtel Saint-Georges, sous la présidence du grand prieur Jacques Gaillarbois Marcouville le 4 mai 1637[2]. L’établissement de ses preuves de noblesse et légitimation connut quelques aléas et va s’étaler sur 4 années pleines de 1633 à 1637 (A42). La difficulté d’obtenir la validation des dites preuves de noblesse est très certainement liée aux choix politiques de la famille de la mère du postulant. À savoir que Michel de Gast, père de Louise de Gast mère du postulant, capitaine des gardes du roi fut très impliqué, jusqu’à l’assassinat, dans la lutte contre les chefs ligueurs (A43).

La famille de Polastron et ses différentes branches ont fourni un nombre particulièrement important de frères hospitaliers. Sur la période 1480 à 1780 on relève, à minima,19 fois le patronyme de Polastron[3]. Denys de Polastron de la Hillière sera grand prieur du prieuré de Toulouse de 1656 à 1662, date de son décès à Malte. Ce sera Jean-Denis-Gabriel de Polastron de la Hillière, son neveu, qui va assurer la construction de sa somptueuse pierre tombale en l’église de la Valette[4]. Sensiblement à la même période un autre de Polastron à savoir Jean-Gabriel de Polastron de la Hillière Ledain devient commandeur de Millau au prieuré de Saint-Gilles. Ce dernier décède le 30 janvier 1698 et aura également l’honneur d’avoir sa pierre tombale en l’église de la Valette à Malte (A25).

Toujours en restant au niveau des ascendants du commandeur Jean-Denis-Gabriel de Polastron il apparait que Charles de Gast, le frère de Louise de Gast la mère du commandeur, fut accepté dans l’Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem le 23 juillet 1612 (A46). Sa mère Louise de Gast est la fille de Michel de Gast, capitaine et gouverneur de la ville et château d’Amboise et d’Antoinette de Montmorency. Cette famille de Gast va fournir à l’Ordre entre 1546 et 1785 au moins 13 chevaliers[5] à l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem.

Le 4 mai 1648, Jean-Denis-Gabriel, alors âgé de 23 ans, est présent en tant que simple chevalier au chapitre provincial annuel du prieuré d’Aquitaine à Poitiers. Le compte rendu de ce chapitre mentionne sa présence mais n’a aucune trace d’une intervention quelconque de sa part. Par contre le registre capitulaire du prieuré d'Aquitaine de la période 1617-1682 mentionne qu’en 1661 il était devenu commandeur de Saint-Rémy. Il a alors 36 ans, or depuis 1631 les critères d’attribution d’une commanderie se sont durcis, il est obligatoire d’avoir participé non plus à 3 caravanes[6] mais à 4 et ce avant ses 50 ans. Nous avons donc au travers de cette nomination la preuve du nombre minimal des campagnes auxquelles il a participé à cette date.

Jean-Denis-Gabriel de Polastron de la Hillière est nommé commandeur de La Feuillée en 1662, il prête, pour cette commanderie, serment de fidélité au roi, le 14 avril 1665.

Il apparait que le commandeur s’installa principalement soit sur le site de la commanderie de Pont-Melvez soit sur celle du Palacret.

Nombre de documents permettent de constater qu’il est pleinement intégré dans la vie locale. Le registre des baptêmes de la paroisse de Pestivien[7] mentionne que le 27 février 1665 est baptisée Anne-Gabrielle Bosquet, fille de Nicolas Bosquet et de Louise Floyd[8]. Le parrain n’est autre que Jean-Denis-Gabriel Polastron de la Hillière, commandeur de La Feuillée.

27 février 1665 signature du commandeur Jean-Denis-Gabriel de Polastron sur le registre des baptêmes de Pestivien (extrait du registre paroissial de Pestivien pour la période 1652 à 1700, en ligne vue 67) , .



Le 7 mars 1665 est baptisé à Pont-Melvez ”Jan fils naturel et légitime d’honorable Jean Hamon[9] et de Janne Hamon sa compaigne” le parrain a été ” haut et puissant Jan Denis Gabriel de Polastron de la Illière chevalier commandeur de la Feuillée…”.

Le 28 juin 1665 à Pont-Melvez est baptisé Denis fils de maître Pierre Derrien et de Françoise Desjartz[10] sa compagne. Et une nouvelle fois le parrain est le commandeur de la Feuillée. En 1665 le commandeur a été élu abbé laïc de la frèrie blanche de Notre-Dame de Guingamp. Cette frèrie est une société religieuse mais également une société d’influence. Ses statuts lui impose un second abbé qui se doit être un ecclésiastique ; ce sera ”le vénérable et discret messire Jacques de la Grève recteur de Pommerit-le-Vicomte, sieur de Kerhalic, bachelier en Sorbonne”.

Cette intégration dans la vie locale met en avant que le commandeur, aux environs de l’année 1664, a fait venir à ses côtés son frère Bernard ainsi que nous le révèle le registre des baptêmes de Pont-Melvez les 2 et 3 mars 1664. En effet à ces deux dates y apparait avec tous ses titres ” haut et puissant messire Bernard de Polastron de la Illière chevalier, seigneur de la Martinière, la Barthe, maréchal des batailles du roy (A44)”. Le 2 mars en tant que parrain de Bernard François fils de Jacques Pinault et le 3 mars en tant que parrain de Marie Hervé fille de François Hervé[11].


Voir la signature de Bernard de Polastron de la Hilliere ( extrait du registre paroissial de Pont-Melvez pour la période 1659 à 1675, en ligne vue 20).



Durant sa présence à la tête de la commanderie de la Feuillée ce commandeur va maintenir les principes de gestion utilisés par ses prédécesseurs. Il ne gère rien en direct, et a passé un contrat de fermage de l’ensemble de sa commanderie avec un fermier général. Sur cette période se sont succédés Jacques Le Brun sieur de Kerprat et Béatrice Coupé son épouse avec un contrat annuel ayant débuté en 1660 et ce pour une durée de 9 années pour un montant annuel de 14000 livres. Ce contrat engagé sous Jacques de Jalesnes fut-il rompu par le changement de commandeur en 1662 ? Dans les années qui suivirent apparait un nouveau fermier général Claude Le Gac sieur de la Villeneuve.

Une longue procédure particulièrement complexe avec de nombreux intervenants[12] engagée à l’encontre de l’Ordre, non encore close en 1679, au bout d’environ neuf années, va nous faire découvrir que le commandeur, certainement dépensier et mauvais gestionnaire, laisse à son décès de multiples dettes qualifiées de considérables. Cette procédure (A45) a été enclenchée indirectement par Bernard de Polastron de la Hillière, frère du commandeur de La Feuillée, et créancier de ce dernier. Le haut conseil de l’Ordre, pour ne pas assumer les dites dettes, va renoncer à la dépouille de ce commandeur.

Cette procédure précise que le mortuaire prit fin le 30 avril 1670 nous permettant ainsi de situer le décès du commandeur entre le 6 novembre 1669 et le 30 avril 1670. Les lacunes dans les registres paroissiaux de Pont-Melvez et de Saint-Laurent ne permettent pas de confirmer avec certitude s’il décéda dans l’une ou l’autre de ces commanderies mais il existe bien plus de preuves documentées de sa présence à Pont-Melvez durant la période où il fut commandeur de La Feuillée.



Renvois aux notes suivantes du texte ci-avant:

[1] Registre paroissial de Loches en ligne pour la période 1619-1637 ; à ce niveau se pose un doute : le parrain est Louis de la Hillière et la marraine Loyse de Gast en effet le prénom de la marraine a été rajouté dans un blanc laissé à l’origine (autre écriture et encre) et sa qualité de tante de Jean Denis Gabriel barré et remplacé par cousine (autre écriture et encre) mais sa signature y figure bien.

[2] Cette date contredit nombre d’ouvrages mentionnant le 7 juin 1631 pour sa date de réception dans l’Ordre entre autres BnF, Volumes reliés du cabinet des titres FR 32404, page 493.

[3] M. Louis de la Roque, Catalogue des chevaliers de Malte, Paris, 1891, p.189. Parmi ces 19 chevaliers portant le patronyme de Polastron 12 appartiennent à la branche de la Hillière.

[4] M. L. Mas Latrie, Les archives, bibliothèques et inscriptions de Malte, Paris, Bibliothèque Impériale, 1857.

[5] Louis de la Roque, Catalogue des chevaliers de Malte, Paris, ALP. Desaide, 1891, p.77.

[6] Caravanes ou armements c’est-à-dire campagnes et avoir été envoyé en garnison sur une des iles de l’archipel maltais (essentiellement Malte) ou sur une des galères de l’Ordre.

[7] Commune des Côtes d’Armor à environ 20 km de Guingamp.

[8] Dans les années qui suivront la famille Floyd sera en relation étroite avec les divers commandeurs de La Feuillée. Elle fournira un procureur général et un fermier général aux commandeurs.

[9] La famille Hamon sera en lien avec la commanderie du Palacret aux XVIIe et XVIIIe siècles : en 1675 Pierre Hamon est procureur fiscal du Palacret ; il deviendra sénéchal du Palacret et Pont-Melvez ; Charles Jacques Hamon sera procureur général du Palacret sous le commandeur de Tambonneau et Jacques Hyacinthe Hamon en deviendra le fermier général.

[10] La famille Desjarts fournira des notables gravitant autour de la commanderie de la Feuillée aux XVIIe et XVIIIe siècles : par exemple en 1701, 1704, 1730 apparait Pierre Desjars, résident à Pont-Melvez, assurant des arpentages des biens de la commanderie de la Feuillée avec la qualification de ”priseur, arpenteur, gauleur, et mesureur de terres” ; en 1739 lors de la prise de possession de La Feuillée au nom du nouveau commandeur Pons-François de Rosset, bailly de Fleury, est présent Jacques Claude Desjars, écuyer, résidant à Guingamp.

[11] François Hervé sieur de Launay a été baptisé à Vernantes le 5 avril 1634(49368) sa marraine fut Eléonor de Jalesnes fille de Charles de Jalesnes sieur dudit lieu et frère de lacques de Jalesnes commandeur de La Feuillée/ Le Palacret/ Pont-Melvez sur la période 1642-1659 ; il épouse à Pont-Melvez le 23 octobre 1659 Etiennette Le Bartz ; ses liens avec l’Ordre sont antérieurs à l’année 1664 : le 3 décembre 1662 nait à Pont-Melvez sa fille Françoise Thérèse elle a pour parrain François Budes du Tertre-Jouan seigneur chevalier des commanderies de Mauléon, Villedieu (de Poitiers), Clisson et la Lande-Vercher.

[12] AD86, 3H1 465.





Ci-après l’arbre d’ascendance de Jean-Denis-Gabriel Polastron de la Hillière, suivi de l’arbre de descendance de Jean de Polastron époux d’Antoinette de Serres et celui de Louis de Gast époux de Jeannette Roux[ Arbres bâtis à partir des Preuves de noblesse des chevaliers du prieuré d’Aquitaine, BnF ms. fr. 32404 ; des registres paroissiaux de Loches, Amboise, plus l’ensemble des autres documents cités dans la présente biographie.]







Armes des de Polastron de la Hillière: d’argent au lion de sable, lampassé de gueules.

Dessin grand armorial Hozier.



Armes des de Gast seigneurs de Montgaugier : d’azur à cinq besants d’or, 2, 2, 1. ( sur site Geneanet d’après ”généalogie des principales familles de l’Orléanais de Hubert par C. de Vassal, Orléans, Herluison, :1862, p 197))


Jean Denis Gabriel de Polastron de la Hillière, annexes

A25- Epitaphe de la pierre tombale de Jean-Gabriel de Polastron de la Hillière, à la Valette, commandeur de Millau.


Relevé de l’épitaphe par M. L. de Mas Latrie, Archives, bibliothèques et inscriptions de Malte, Paris, Bibliothèque Impériale, 1857.


A42- Episodes de l’établissement des preuves de noblesse de Jean-Denis-Gabriel de Polastron la Hillière : sources registre capitulaire du prieuré d’Aquitaine sur la période 1617 à 1682, BnF 3068.

· Lors de la réunion du chapitre du prieuré d’Aquitaine à Poitiers le 2 mai 1633 ”s’est levé ledit sieur de Coublant [Olivier de Coublant de la Touche à cette date commandeur de l’Hôpital Ancien d’Angers, reçu dans l’ordre en 1595] lequel a présenté une grace de minorité donné par le chapitre general dernier a Denis Polastron [ce dernier est alors âgé de 8 ans] fils de Mre Gabriel de Polastron la Hillière et de dame Louise de Gast et requis commission pour faire les preuves et legitimation, aiant paie la somme convenue par ladite grace, qui lui a esté octroié”.


· Lors de la réunion du chapitre du prieuré d’Aquitaine à Poitiers le 5 mai 1636 ” S’est levé monsieur le commandeur de Guéliant [Gilles Peschard de la Bothelleraie receveur du prieuré d’Aquitaine] lequel a requis renouvellement de commission estre donné a Denis de Polastron escuyer fils de deffunct Mre Gabriel de Polastron chevalier sieur de la Hillière , gouverneur du chasteau de Loches et de dame Louise du Gast son espouse pour faire la preuve de sa noblesse et legitimation qui lui a esté octroié”.


· Lors de la réunion du chapitre du prieuré d’Aquitaine à Poitiers le 4 mai 1637 ” C’este levé Gilles Peschard, commandeur de Guéliant, lequel a presenté les preuves de noblesse de Jehan Denis de Polastron, escuier, et requi pour ceste effect on esté nommez frère Ambroise des Perriers Bouchet, commandeur d’Artins, et Emmanuel Gillier de Puygarreau. Lesquels dit sieurs commandeurs ont rapporté avoir veu les dites preuves qu’ils trouvent bonnes et valables bien qu’il ne paroisse assez de contracts ny partages pour les raisons que la dite dame a allégué devant les dits sieurs commissaires. Neanmoing l’on s’est esclairé par les preuves de deffunct chevalier du Gast, oncle maternel dudit de Polastron [très probablement Charles de Gast reçu dans l’ordre de Malte le 23 juillet 1612] et de surplus s’en rapportent a messieurs de la venerable Langue de France”.

A43- Michel de Gast et son engagement contre les ligueurs.

Louis XIV et son ministre Jean-Baptiste Colbert envoyèrent des commissaires dans les différentes provinces de France avec pour mission de rendre un compte exact et sévère de l’état des choses. Ces rapports servirent à Louis XIV pour édifier ses grandes réformes sur l’organisation judiciaire, la marine, les forêts, le commerce. Charles Colbert de Croissy, frère du ministre, en 1664, figure sur la liste des intendants des généralités de Tours et Poitiers, quand il transmet ”son rapport à faire au roi sur la généralité de Tours”.

CH. de Sourdeval publie, d’après le manuscrit conservé à la Bibliothèque Impériale, Le rapport au roi sur la province de Touraine, de Charles Colbert de Croissy, à Tours, Imprimerie Mame, 1863. Ouvrage duquel nous tirons l’essentiel des informations suivantes.

Michel du Gast, père de la mère de Jean-Denis-Gabriel de Polastron de la Hillière était capitaine dans la garde personnelle du roi Henri III et faisait partie des ”quarante-cinq” qui assassinèrent Henri de Lorraine duc de Guise le 23 décembre 1588 à Blois. Le lendemain le capitaine Michel de Gast désigna les trois soldats de sa compagnie à savoir Gosy, Chalons et Viollet, qui moyennant le versement de 400 écus, assassinèrent Le Cardinal de Guise Louis II de Lorraine.

Faisant suite à ces deux meurtres le roi fit arrêter les principaux partisans du parti de Lorraine : le cardinal de Bourbon, Pierre d’Espinac archevêque de Lyon, le duc d’Elbeuf, Anne d’Est mère d’Henri de Guise, le prince de Joinville fils d’Henri de Guise, Charles de Savoie duc de Nemours. Le roi fit conduire les prisonniers à Amboise où Michel de Gast, constitué gouverneur de cette ville, fut chargé d’assurer leur garde. Le roi ayant eu vent que Michel de Gast, circonvenu par les ligueurs, envisageait de relâcher ses otages, négocia avec ce dernier et lui versa 30000 écus afin d’obtenir la remise immédiate du cardinal de Bourbon, du prince de Joinville et du duc d’Elbeuf, en lui laissant la faculté de traiter avec la Ligue quant à la rançon des autres prisonniers.

Le même ouvrage mentionne que grâce à cet enrichissement Michel de Gast acquière la terre de Montgauger. Qu’ayant épousé Antoinette de Montmorency il aura pour enfants :

· Roger de Gast, l’aîné, lequel se verra attribuer, en 1623, le titre de marquis de Montgauger en récompense des services rendus par ses ancêtres. A son propos Charles Colbert dans son rapport au roi note : ”le sieur du Gast, marquis de Montgauger, seigneur de Crissay, chicaneur, exerçant des corvées, battant les paysans, et faisant faire les rôles chez lui et de la fausse monnoye, de plus il a plusieurs informations contre lui, s’est toujours tenu couvert de son pont-levis”.

· Charles de Gast de Montgauger, chevalier de Malte.

· Anne qui épousa en 1614 Jean-Gabriel de Polastron la Hillière seigneur de Grillemont (à noter que ce prénom est erroné : dans la demande d’admission dans l’ordre de Malte de Jean-Denis Gabriel de Polastron elle est mentionnée sous le prénom de Louise ; ce même prénom est mentionné lors du baptême de son fils le futur commandeur, lors des baptêmes de ses autres enfants et lors des multiples baptêmes où elle fut marraine).

A44- Bernard de Polastron et l’ordre des Hospitaliers de Saint- Jean de Jérusalem

Bernard de Polastron n’appartient pas à l’Ordre mais nombre de membres de sa famille l’ont intégré dans le passé et même de son vivant plusieurs s’y illustrent. Pourtant soit lui-même ou soit sa famille eurent des velléités afin qu’il soit admis comme chevalier dans l’Ordre. En effet le 4 mai 1643, en la ville de Poitiers, en l’Hôtel Saint-Georges, siège du prieuré d’Aquitaine, débute le chapitre provincial annuel présidé ”par illustre frère Guy Tourpin de Crisse” le grand prieur. Dans le cours des débats ”c’est levé frère Jacques de Jalesnes, commandeur d’Ansigny et de la Feuillée, lequel a demandé commission pour faire les preuves de la noblesse et légitimation, de noble Bernard de la Hillière, fils de feu Jean-Gabriel de la Hillière et de dame Louise de Gast. Ce qui lui a été octroyé. Pour autant son dossier de preuves de noblesse ne sera pas présenté au sein du grand prieuré d’Aquitaine ; je n’ai pu découvrir les éléments qui ont conduit à ce changement d’attitude et n’ai relevé que de rares informations sur sa vie ultérieure : présence en Bretagne auprès de son frère Jean-Denis-Gabriel commandeur de la Feuillée, son mariage en 1671 avec Anne de Burosse, ou encore l’épisode ci-après.

En 1660 Denis de Polastron, oncle de Bernard de Polastron, reçu dans l’Ordre en 1592, y a fait carrière et est devenu le grand prieur de Toulouse[1]. En 1660, dans les environs de Boudrac, paroisse située sur le territoire où ledit prieuré possède des commanderies et dépendances sévit Gaspar du Plan. Cet aventurier depuis son château y répand la terreur et désolation. Le grand prieur de Toulouse n’a pas sur les lieux les forces suffisantes pour réprimer ces désordres. Il fait appel à l’autorité du roi. Ce sera son neveu, Bernard de Polastron qui se charge de rétablir l’ordre et de se saisir du coupable[2].

A45- Eclaircissements concernant les dettes du commandeur Jean-Denis-Gabriel de Polastron, sa dépouille et ses créanciers (source AD86, 3 H1 465).

· Anne Noirs, créancière de Bernard de Polastron sieur de la Hillière, engage une procédure à l’encontre de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Cette procédure porte sur la dépouille, c’est-à-dire les biens que le commandeur possède lors de son décès ; biens qui, selon les statuts de l’Ordre doivent lui revenir. Elle réclame sur ” la dépouille de défunt Jean-Denis-Gabriel de Polastron, commandeur, débiteur de sommes considérables envers le sieur de la Martinière, son frère, demandeur en requête suivant deux commissions de la Chancellerie du Palais des 3 juillet et 7 août 1675.

· Cette procédure n’est pas allée à son terme du fait du décès d’Anne Noirs. Pour autant elle est relancée par sa sœur et héritière Jeanne Noirs. Des arrêts sont pris les 30 mars 1679, juin 1680, 23 janvier 1681. Et le 11 février 1681 Claude de Brilhac, commandeur de l’Isle Bouchard et de Villegast, receveur du Commun Trésor de l’Ordre, renonce à la dépouille du commandeur de la Feuillée et remet à Jeanne Noirs, demeurant paroisse de Saint-Germain l’Auxerrois, 11 créances ( d’un montant estimatif de 2200 livres) que possédait le commandeur de la Feuillée pour des prêts qu’il avait fait à divers notables sur la période 1662-1669 ( le 24 décembre 1662 12 pistoles d’Espagne au chevalier Laugeois, le 5 janvier 1667 90 louis d’or au sieur de Coetlogon … le 6 novembre 1669 150 livres à Talange). A charge pour Jeanne Noirs de verser le surplus à l’Ordre lorsqu’elle aura été payée !

· A priori Jeanne Noirs a récupéré son dû, mais il n’en est pas de même pour les héritiers de Bernard de Polastron. Le 9 janvier 1691 ”Anne de Burosse[3], se disant veuve de messire Bernard de Polastron La Hiliere seigneur de la Martiniere et se prétendant sa créancière a fait faire assignation ledit Ordre au conseil pour exploit pour être condamné à lui payer la somme de 6000 livres”. L’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem lui a fait signifier les 15 et 20 mai 1691 que la demande était non recevable et mal fondée parce que ledit Ordre n’était pas débitable de la dépouille pour y avoir renoncé ”.

· Anne de Burosse a cédé sa créance à Gabriel Dubaye. Ce dernier reprend le 18 août 1695 l’instance qu’Anne de la Hilliere avait pendante au conseil contre l’Ordre. Léonard de la Barre de Saulnaye chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de Balan, receveur du Commun Trésor au prieuré d’Aquitaine rejette la dite requête avec l’argument que la dite dame aurait abandonné sa procédure en 1691 et n’en aurait fait aucune depuis.

A46- Informations concernant Charles de Gast

Charles de Gast, oncle du commandeur Gabriel de Polastron de la Hillière fut reçu dans l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem au sein du prieuré d’Aquitaine en 1612. L’instruction de son dossier par l’Ordre fut réalisée en moins de 3 mois, alors que la durée minimale moyenne était de l’ordre d’une année et que celle de son neveu Jean-Denis-Gabriel de Polastron prendra près de 4 années, éléments qui laissent soupçonner qu’il bénéficia de passe-droits. Charles a entre 15 et 16 ans lors de sa demande d’admission et serait donc né en 1596 ou 1597.

Déroulé de son admission[4] :

1. Lors du chapitre provincial du prieuré d’Aquitaine qui débuta à Poitiers le 7 mai 1612

C est levé reverand le bailly de la Morée frere Simon Cheminé

quy a presante Charles Dugast escuier fils de noble Michel

Dugast chevalier de lordre du roy et de dame Anthoinette de

Monmoransy ses père et mere age de quinze a seize ans quy

a requis commission pour faire preuves de sa noblesse. quil

luy a esté accordé”.

2. Lors de l’assemblée provinciale du prieuré d’Aquitaine qui débuta à Poitiers le 23 juillet 1612

C est levé le commandeur d Amboise frere Pierre

Viault et frere Andre Grain de Sainct Marsault

commandeur d Auzon lesquels ont requis commission

pour voir les preuves par ecrit faictes de escuier Charles

Dugast. Lesquelles apres les avoir veu ont declaré

este faictes sellon les hus et statuts de l ordre par

le frere de [la commanderie de] Sainct-Remy [Ambroise Chasteigner à cette date] et chevalier de Ligné [Gabriel Dorin].

Charles de Gast n’est alors âgé que de 15 ou 16 ans.

Sa présence n’est pas attestée dans les réunions des chapitres provinciaux ni des assemblée provinciales du prieuré d’aquitaine sur la période 1612-1617 ni 1617-1682. A partir de ses 16 ans il a donc très probablement rejoint Malte afin d’assurer selon les statuts de l’Ordre ses missions de ”défense de la chrétienté contre les Ottomans”. A ce jour je n’ai découvert qu’un seul élément qui en apporte la preuve. Après le 12 juillet 1614, à une date non précisée « Michel de Gast son père, Roger de Gast son frère aîné, ses autres frères et sœurs, Jean-Denis-Gabriel de Polastron époux de sa sœur Louise se portent garant d’un emprunt de 8000 livres destiné à payer la rançon de Charles de Gast alors prisonnier des turcs[5].



[1] Il assure cette dernière fonction de 1656 à son décès le 1 septembre 1662.

[2] Antoine de Bourg, Histoire du grand prieuré de Toulouse, Toulouse, Louis Sistac et Joseph Boubée éditeurs libraires, 1883 ; archives de Boudrac L. II.

[3] Anne de Burosse, mariée en 1671 à Bernard de Polastron de la Hillière (Jean-Baptiste de Courcelle, Dictionnaire universel de la noblesse de France, tome III, Paris, 1821).

[4] BnF NAF 3067 registre capitulaire du prieuré d’Aquitaine 1590-1617.

[5] Estienne Pallu, Coustumier du duché et baillage de Touraine, anciens ressorts et enclaves d’iceluy, Tours, Estienne Latour, 1661, pp414-415.